Markstein, Rothenbachkopf, Rainkopf, Hohneck, Schlucht, Tanet, voilà quelques noms bien connus des amoureux du massif vosgien. Créer une course qui emprunterait une bonne partie de ces Crêtes Vosgiennes, c'est le défi que s'était lancé Luc Marlier il y a maintenant plus de 40 ans. Plus qu'une redoutable épreuve, la course des crêtes appartient à l'histoire, parfois considérée comme la premiere course trail de France, constituant ainsi les prémices de notre formidable discipline. Afin de perpétuer la tradition, le dimanche 20 août, c'est sur les crêtes, les Crêtes Vosgiennes que j'ai couru.
A moins de 2 semaines de l'objectif majeur de cette année 2017, à savoir la CCC, il n'était pas permis de se blesser bêtement, que ce soit en course ou à l'entrainement. Accumulant une certaine fatigue depuis quelques temps, la charge d'entrainement et la participation aux différentes courses ont volontairement été diminuées. S'il n'était pas permis de fauter si proche du but, je pensais personnellement qu'il n'était pour autant pas permis de faire une croix sur le rendez-vous immanquable de cette fin du mois d'août. Ayant participé aux 33 kilomètres l'an passé et à moitié raisonnable, je décide de m'inscrire sur la formule light de la course.
Départ de la Schlucht, 13 kilomètres, 450 mètres de dénivelé positif, rien de bien méchant sur le papier peut-on penser. Il est vrai que pour une épreuve vosgienne, le dénivelé reste relativement faible. Comme son nom l'indique, la course ne fait qu'emprunter les différents sommets constituant les crêtes vosgiennes, de ce fait, le profil de la course reste plutôt plat. C'était sans compter sur la technicité de la course.
Nombreux sont les marqueurs qui font de cette course, une course unique, à l'ambiance particulière. Dans un premier temps, la ligne de départ doit être ralliée en bus depuis la ligne d'arrivée. A 8h00 tapante commence ainsi le ballet des cars réquisitionnés pour l'événement. L'occasion de tendre l'oreille et d'écouter les différentes histoires que certains ont à conter. Chacun y va de son anecdote sur la course ou sur les éditions précédemment courues. Bien évidemment, on entend le classique "les crêtes, si il fait moche et que c'est bouché, on voit pas à 20 mètres, on profite franchement pas du paysage", ou encore le " l'année dernière j'étais bien parti sur les 20 premiers kilomètres, mais passé le col de la Schlucht, on a l'impression que les rochers poussent comme des champignons, impossible d'avancer !". Il n'est pas rare non plus d'entendre qu'untel a déjà participé à la course il y a 10 ans. Car oui, cette année, il s'agissait de prendre part à la 42 eme édition : juste incroyable.
Arrivés à la Schlucht on récupère les dossards en vitesse, puce au pied, et vient le temps de l'attente. Le temps de faire le tour de la station qui doucement prend vie. Mais surtout le temps de voir quel est le terrain qui fera office de point de départ.
J'avais oublié que le départ se faisait dans la pente directement, le tout direction les Trois Fours. Comme a mon habitude, je commence à m'échauffer, mais m'arrête au bout de quelques minutes en me disant que aujourd'hui, j'adopterai un rythme modéré, exemple parmi d'autres de la légendaire sagesse qui m'anime. Tout le monde se place sur la ligne de départ, je suis aux avant-postes sans être en toute première ligne non plus. Je discute avec mes voisins, " l'année dernière le 33km, blabla, cette année le 13 blabla, fatigué ...", que le départ est déjà donné. Plein d'entrain j'attaque la montée, genoux haut, attaque avec les bras, tout le savoir faire et la technique de la bonne course en pente raide sont mis en oeuvre ... durant 50 secondes, tout au plus. Je regrette déjà amèrement de ne pas m'être échauffé convenablement. Malgré tout je fais l'effort de courir jusqu'en haut. Plutôt violent comme mise en route, mais la difficulté est suivie d'une petite descente plutôt sympathique qui permet de souffler quelques instants.
crédits : site des Crêtes Vosgiennes
La course reste rapide et permet de bonnes relances, à condition d'être prudent et d'avoir les appuis sûrs. En-soi, la difficulté de la course ne réside pas dans le dénivelé de cette dernière, mais plutôt dans la technicité de son parcours. On alterne entre espèces de faux pierriers, ou chemins fortement caillouteux et chemins plutôt roulants abrités par quelques haies. Bien évidemment, profiter du paysage est une obligation, surtout lorsque la météo comme cette année le permet parfaitement.
La course suit son cours et arrivé au ravitaillement je ne m'arrête pas, ayant emporté de l'eau avec moi. J'avais oublié à quel point la course pouvait être piégeuse, devant moi les chevilles se tordent, les muscles se crispent, autant de manières de me rappeler qu'il convient aujourd'hui de ne pas se blesser. J'imagine un instant être un chamois, le pas léger, aux appuis rebondissants et aériens, j'essaye de sauter de pierre en pierre, mais rien n'y fait, en ce jour, du chamois je n'ai que le filet de bave qui s'extirpe de ma bouche.
Ayant adopté un rythme de croisière confortable, je ne ressens pas la fatigue, je prends le temps de discuter avec mes compagnons de course sans ressentir la moindre gêne. Paradoxallement je n'arrive pas à accélérer le rythme, mais pour autant ne suis pas en état de souffrance. 13 kilomètres c'est court, et vraisemblablement je ne suis plus habitué à courir ce genre de distance. La course se termine par une longue descente d'un bon kilomètre dans la verte herbe de la station du Lac Blanc. 1h12 au chrono, on m'annonce une "cIIIINquante Seeeptième place" (oui oui, c'est l'accent Alsacien que j'essaye de retranscrire ici). Plutôt satisfait car rien ne me fait souffrir à l'arrivée, sur une course qui pourtant était exigeante. Je récupère mon lot finisher, à savoir un sympathique t-shirt et quelques bonbons de la confiserie des Hautes-Vosges de Plainfaing. Arrivé au ravitaillement, je vois une fois encore qu'on consomme local en Alsace : Elsass Cola, Lisbeth et munster sont au rendez-vous.
Pour conclure, si je devais recommander cette course, c'est sans hésiter que je le ferais. Les paysages y sont magnifiques, et nous laissent apprécier la beauté de la montagne vosgienne. Une course qui nous rappelle que le massif vosgien, trouve également sa place au sein d'une région Alsacienne, qui a su mettre en valeur tout le potentiel qu'avait à lui offir ses terres, et ce depuis bien plus de temps qu'on ne le croit. Toutefois technique, l'humilité et la prudence seront de rigueur pour mener à bien cette course des crêtes, des Crêtes Vosgiennes.